Accelerator Jo + 25 + Le Singe Blanc + Lucertulas en concert Embobineuse – Marseille 19 fevrier 2011

 Dans Chroniques de concert

Marseille 2111

L’heure est a la crise, partout en France et dans le monde, la musique se meurt. Plus exactement, certaine émotions musicales disparaissent, victimes d’un mystérieux virus.
Voilà que les aberrations déambulent dans la rue, avec leurs faciès putrefiés de zombies du bois de Boulogne, projetant leurs déjections roses contre les murs, en poussant des râles de cormorans agonisants sous le pétrole. L’horizon n’est plus qu’un terrain vague , et le ciel le dernier refuge pour pleurer. Dur les gars. Super dur.
Les survivants se nourrissent de barres mars périmées et de fanta frelaté. En regardant le Mickey souriant sur l étiquette , l’ironie devient insoutenable. Quelle est loin l’époque ou l on pouvait encore croire a l’illusion du bonheur. Il est mort le soleil, il est mooooort gémissent les non-infectés au fond de leurs caves insalubres éclairées par la Lumière anachronique de leurs lampes de poches. C est l’échec grave.
Alors comme dans Postman (oui Postman), et quand la nuit n est pas trop meurtrière, les humains se retrouvent dans l’Embobineuse, une ancienne usine de taille-crayons reconvertie en asile d’ alienés post-apocalyptique.
J’y suis ce soir, parceque ce n’était pas trop dur de se frayer un chemin pour une fois. Pas trop de monstruosités de sortie (en plus la nouvelle generation de zombies Rhianna est plus facile à repérer: avec leurs cheveux roses et leurs string en métal, on les voit de loin. Ça laisse largement le temps de s enfuir en rampant avant de se faire trépaner.)

Voici Accelerator Jo qui montent sur la scène de fortune. Au milieu du décor madmaxien et des cadavres de voitures, se trainent quelques hagards aux yeux globuleux et agrandis par la faim. Visages frappés du sceau d’ une stupeur permanente, tristes loques, souvenirs d’ un monde perdu (a-t-il seulement déjà existé ? Cela fait si longtemps), qui s’approchent pour regarder la pantomime.
Une belle bande de crevards, ces musiciens. Union incestueuse de deux gangs de violeurs de cadavres. Voici que les premières notes fragiles refleurissent des amplis de fortune, et une mélodie désuette se met a bourgeonner, comme échappée d’ une antique radio. C est le rêve d’ un ancien style, d’ une époque ou les psychotiques portaient de longues bananes graisseuse et étaient affutés comme des lames de rasoirs en adamantium. Bêla Lugosi était le Zenith du romantisme, et un chanteur a la mode mettait la tête tranchée de sa copine dans sa television , pour pouvoir la regarder tout les jours du fond de son canapé.
Les Jos chantent les crevards que nous sommes, et les corps commencent a se tortiller. Des larmes de nostalgie coulent sur les joues creusées. Finalement, un vivant-mort vaut il mieux qu un mort-vivant ? Tout cela est si triste.

 

 

C’est au tour de 25. Je m’approche tout devant car j’aime beaucoup ce groupe. Au début, ils étaient réellement 25 mais ils ont perdus vingts deux membres avec les aléas de cette sombre période. Certains dévorés vivants, d’ autres morts de maladies gluantes et spectaculaires, ou bien violés et assassinés par des gangs de motards crevards sado-masos, morts de faim, morts de froid ou morts d’ ennuis, seul les trois plus trapus sont encore la. Au fil du temps ils ont rafistolés de vieux défibrillateurs et ont décidé de faire de la musique avec. Je subis avec un plaisir primaire la séance d’ électrochoc, rafraichissante comme ces douches dont parle les légendes. Les cœurs qui battent se réchauffent et dansent ensemble un Paso Doble plus vieux que le temps lui même . Nous sommes encore vivant.

Le singe blanc, un noir et un gris (mécanique celui la) prennent la suite. Ils sont hirsutes mais ont l’air plus humain que nous. Au moins il ne se demandent pas pourquoi ils font de la musique, ils ne théorisent pas, il ne se cache pas les yeux, les oreilles et la bouche.
« hiik » crie le singe blanc
« houk ! » répond le singe noir
« boum boum boum pshing ! » fait le singe gris mécanique avec ses cymbales accrochées au pattes. Et ainsi de suite. Les cousins primates déclarent ouvert le tribalisme pré-homo sapiens, aussi les pieds affranchis se lâchent pataudement, essayant de briser les chaînes de la lourde gravité
« houk ! » fait le singe blanc
« hiik ! » dit le singe noir
« pshing pshing pshing boum ! » s’emporte le singe gris mécanique.
« stomp stomp stomp ! » font les pieds de toutes leurs plantes. On s’agite tous d’ un seul bloc de saint Guy. Paradoxe quand on y pense, a cette conscience collective, la même qui anime tous ces zomblard dehors. Peut être que ce qui nous sauve, ou nous maudit, est de songer a autre chose qu’a la viande. Parfois nous ressentons une vibration dans nos cœurs diapasons quand une petit fleur éclôt de la merde, ou qu un gros caca s étale sur un parterre de coquelicots écœurants. C est finalement notre propension a ressentir, notre refus d’ être programmé, qui nous relit a la quintessence même de cette chose qui nous englobe, et que nous arrivons mal a nommer. Ce sentiment confus, cet instinct opaque.
Le dresseur remets les singes dans leurs cages, et la transe redescend en attendant la prochaine.

 

 

Voici les fous mystique de Lucertulas qui viennent achever la messe. L’ apocalypse et l’overdose de nouvelles d’H.P Lovecraft leur ont grillés leurs fusibles italiens. Depuis ils passent leur temps a invoquer des dieux antérieurs devant tout les passants. Ça ressemble un peu a un spectacle avec des hologrammes. Le trio prie et se concentre en tressant leur musique sophistiqué comme un mode d’ emploi sur le psychédélisme des banlieues sataniques, puis la méditation intense fait sortir de leurs bouches et leurs têtes des volutes soit bleues, soit rouges, soit violettes.
« oh le beau cthulhu ! »
« oh le joli shub-niggurat »
« ouah le nyarlatothep ! »
C’est sur, c’est plus raffiné que de regarder la télé ( de toute façons les rares postes qui émettent encore passent en boucle le même épisode d’un diner presque parfait, celui ou Denis de la Bourboule prépare un couscous au chocolat.)

On entend soudain le bruit de milliers de mains décharnés frapper violemment sur la lourde porte blindée de notre abri. Merde ! Une armée de Chanteurs de variétés francaise enragés. La bave au lèvres et les yeux injectés de sang. Alerte rouge.
Je serre dans ma main la photo de femme a poil qu’on m a donné à l Embobineuse. Tu te souviens, toi, quand c était pour de vrai ?
Je sors mon cutter. Le retour va être pénible.

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