Texte à l’arrache 129

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Ceci est un pas de plus dans l’intrépidité : pour la deuxième fois au monde, voici quelques lignes à propos d’un concert que je n’ai pas vu ! Encore plus fort : cet article n’est pas écrit par son auteur. Imaginé, réfléchi, rédigé mentalement, jamais ses doigts ne vont tapoter un clavier. Ce sont ceux d’un autre, reliés au cerveau du penseur principal par de nouvelles techniques chirurgicales inédites, qui vont se charger du boulot. De quoi propulser cette prose dans une dimension parallèle de négritude linguistique encore jamais atteinte ! Récapitulons : Hier soir, Gin, celle avec laquelle j’aimerais que l’on lie nos cercueils ensembles, et Furax, généralissime tapeur de zombies migraineux, sont allés voir Shiloh et Moon Ra. A la Machine à Coudre, 6 rue Jean Roque, haut-lieu du concert souterrain depuis plus de vingts ans. Shiloh est le nouveau projet du guitariste et du batteur d’Elektrolux, groupe de soviet-twist légendaire (voir texte à l’arrache précédent). Le privilège de les écouter ne m’ayant pas encore été donné, c’est avec une totale subjectivité que j’affirme qu’ils sont excellents. Moon Ra, kiffé rue du Rock, c’est du psychdélisme arachnéen qui fait monter au plafond avec ses trances immenses. Très très très bon. Lecteur, tu peux hausser les épaules : je n’étais pas là. Mais tel un Danton litteraire, je vais maintenant décrire avec audace (grâce à ses notes) le spectacle que ma femme a maté. Attachez-vos ceintures, nous partons vers des phrases où les mots de l’Homme n’ont encore jamais posé les cédilles. Tout le monde est prêt ? Allumage de pétard ! Frrrsssshhhhhhhhhhhhhhhh…

« La bière coule à flot. Shiloh, compresseur de silo, two-men shoah du dix-neuvième siècle. Le stetson de David Eugène Edwards, assis comme toujours dans un coin, se rabougrit d’envie devant la concression sonore surgissante. La tectonique continentale sovietique écrase de son poing le roc armoricain en général. Voici devant nous le sale rapt du folklore capitaliste, élektrocuté par deux ouvriers des steppes envoûtés. Le rock nous rend plus fort, fait saigner nos tympans de dodos mélomanes. Ils racontent une vieille histoire qui remonte les tripes des pendus, offrants leurs viscères comme des Fu-Manchu hurleurs, éraillés célestes ! Bonne soirée camarades ! Une autre ! Une petite ! Une autre ! scande le public cocoperatif. Rappel pour se prendre encore un coup de pelle, et s’enterrer dans cette contrée qui me paganise la Pangee. Entracte. Avec Furax, on va manger des oreillons. On discute du concert. Lui ressent l’air de famille elektrolux, moi, haier. Et voilà Moon Ra ! Amon-Rat ! La Lessiveuse du Nil, le Bulldozer Constructeur de Civilisation pyramidante. Ecoutez le son du korg : « tttttttpppp tttttypppp ttttppp tpoying », c’est ainsi qu’il abreuve les champs de blés dont on invente la bière. Seb est absent, mais Christophe est là. De la trépidation infernale surgit des visions de six cent soixante-six et de Jésus tortureur d’ibis. Ma psyché s’illumine, de retour avec les Floyd à Pompei, sous le passage d’un groupe aimé de Pélicans. Cette activité musicale s’accorde avec mon abus de pintes. Manquerait plus que je visse apparaître le spectre du Saint-Suaire, car putaing, qu’est qu’on sue ici ! Je déonstruit le sol en le pilonnant de mes pieds. Je bouge des blocs de sons avec mes bottes ! Une motte sonore enfouit l’esclavagisme, c’est organique numérique 010101001111110. Mon cerveau est soutiré par un triangle, et mes organes se barrent … Est-ce une liquéfaction ou une liquidation de momification ? Pffff encore une considération de sec. »

Le compte-rendu s’arrête ici. Après, il y a surement l’extinction des bruits, le bavardage des amis au comptoir, pendant que cliquètent les instruments dans leurs étuis, et les amplis sur leurs roulettes. Ensuite, retour aux pénates, en bavardant sur le pont de la rue d’Aubagne, où coulent les voitures… Les deux rascals entrent dans l’appartement alors que je plane à trois mille pieds au dessus de Saint-Malo. Pendant que l’ulm simulé survole l’ile du Bey et la tombe de Chateaubriand, Furax pose ses fesses sur le canapé. Lors du show, il s’est pris une machette dans la joue droite, mais il accepte volontiers un café. Ils me racontent leur soirée. Celle de Furax était aussi psychotronique que celle de ma permanente moitié d’âme, je lui laisse le soin de la narrer, pour l’instant, on va se coucher.

(Bravo a Shiloh (James McClellan) et Moon Ra (Fabien Palenzuela), qui ont été superbe, c’est obligé. Dédicacé à Véner Lacombine et Gina Bortolazzo. Je t’aime)

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