Texte à l’arrache 165

 Dans Textes à l'arrache
Ma littérature tourne souvent autour de la coprophilie, mais pour ce cent soixante cinquième texte (plus que deux cent !) je vais peut être me justifier.

Oh, la stagiaire de la maison d’édition doit être dégoûtée de l’occurrence quasi permanente du mot caca/crotte/merde/fiente/chiasse dans mes lignes. Elle l’a lu jusqu’à la lie, puis est partie se laver mains et yeux en frottant fort, après avoir jeté d’un geste Universitaire le manuscrit par la fenêtre.

Antonin Artaud l’a hurlé, dans « Pour en finir avec le jugement de Dieu », le processus de digestion fait de nous des vivants. Impossible d’y échapper, si on compte exister. Et en effet, tout le vivant chie. Les chiens chient, les oiseaux chient, les abeilles chient, les paramécies chient, même les lits chient… Vulgaire ? Est-ce que la vie est vulgaire ?

Le Momo génial le dit si bien : « Il [l’homme] a choisi de chier, comme il a choisi de vivre ». Quelle profondeur, quelle poésie, quel bon sens, quelle Vérité ! Et il ajoute, toujours aussi clairvoyant : « C’est que pour ne pas faire caca, il aurait fallu consentir à ne pas être, mais il n’a pu se résoudre à perdre l’être, c’est-à-dire de mourir vivant. » On atteint des sommets métaphysique. Alumnus du collège-lycée du Sacré-Cœur, 22 rue Barthélemy, 13001 Marseille, je suis si fier d’avoir longé les même couloir que toi, je t’aime.

Alors, ceux qui s’offusquent du fécal sont ils des constipés ? Il n’y a qu’un pas que nous franchissons avec hardiesse.
Ces certains qui qualifient Artaud de fou, sont les même qui lui aurait volontiers planté des électrodes dans les tempes, « au nom de la guérison des malades ». Assassins de la pensée, vous êtes méprisables.

L’acte de chier est libérateur, de plus, c’est une parfaite métaphore de la création artistique. J’ai poussé, poussé, poussé, poussé sept ans avant de sortir mon premier vrai roman, j’ai crié, j’ai geint, pleuré, douté, espéré, je suis allé le chercher avec les doigts, avec le bras, et quand enfin il est tombé, plouf, dans la cuvette de la réalité, je ne me suis jamais senti aussi léger. Je l’ai contemplé, tout fier d’avoir fait ce gros pavé. Depuis, je défèque dans la joie, sans problème.

A des strates bien loin au dessus de votre actuel servant, Rabelais lui même s’est complu dans l’ordure, a parlé de merde en s’esclaffant. C’est un des plus grands écrivains (et un des plus marrant) de notre langue, sans contestation possible. Guillaume Musso ne parle jamais de caca.

Donc, si la répétition de la syllabe vous amuse, continuez de vous en réjouir. C’est si bon de rire comme un bébé . C’est si rare. Si vous vous en détournez, condescendants, vous n’êtes vraiment pas très sérieux, avec votre poubelle en fonte sur la gueule. Crions le haut et fort, en pensant à notre ami Antonin :
« CACA ! »

(illustration : Antonin Artaud (1896-1948), Le théâtre de la cruauté, vers mars 1946 Mine graphite et crottes de couleurs grasse sur papier, 62,5 x 47,5 cm, Paris, Centre Pompidou )

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