Texte à l’arrache 190

 Dans Textes à l'arrache

Dans les années 20.., il y avait un homme qui s’appelait Gilbert. Il habitait la Ciotat, cité des Bouches-du-Rhône, avec femme et enfant.
Gilbert aurait pu être un quidam comme tant d’autres, or ce dernier n’était pas si banal. Depuis son plus jeune age, ce singulier personnage avait voué son existence à l’enrichissement de son cerveau. Ce qu’il aimait, c’était apprendre, encore apprendre, toujours apprendre, et, comme sa nature tendait naturellement vers les sciences, il avait attisé le feu de son esprit avec des feuilles et des feuilles de livres techniques. Il avait également fortifié son corps et ses mains, car il était naturellement fort et habile. Rien ne lui plaisait plus que d’assembler des trucs,des bidules, des machins. A l’école, ses professeurs s’interloquaient de le voir bricoler sans cesse de petits jouets, plutôt que de se focaliser sur ses leçons de français et d’histoire. Ils ne comprenaient pas que les intelligences sont pareilles à des flèches tirées : elles tendent vers des cibles précises, et chercher à détourner leur course ne leur fait que rater le centre.
Bon an, mal an, Gilbert approfondissait son savoir-faire. Adolescent, un de ses amis lui confia son ordinateur : un amstrad cpc dont le lecteur de disquette ne marchait plus. Il parvint à le faire remarcher, en reliant une pile au moteur, avec du papier alu. Le bricolage incongru marcha, mais pas suffisamment pour réparer la machine. Le copain lui laissa la carcasse de l’engin, connaissant sa passion pour les circuits imprimés. Ce fut le point de départ d’une incroyable aventure.
Gilbert, qui aimait les défis, décida de retaper l’amstrad, coûte que coûte. Et il s’y employa obstinément pendant des années.
En vérité, il réussi très vite à refaire marcher l’appareil. Son système d’alimentation convoyé par papier alu fonctionnait si bien, que soudain les portes de sa perception s’ouvrirent sur de nouvelles possibilités : il sentait, sans vraiment savoir, ni dire pourquoi, qu’il pouvait faire de grandes choses en creusant dans cette voie. Les bandes de papiers alu se multiplièrent. Encombrantes et primitives au début, elle ne cessèrent d’être améliorées, optimisées, perfectionnées par ses soins. Que l’amstrad fonctionne, ce n’était plus qu’un détail. Dans le secret, Gilbert créait quelque chose d’autre.
Il avançait en age, il s’aguerrissait. Après le lycée, il entreprit des études scientifiques. Études qu’il spécialisa dans l’informatique, puis approfondi en bio-informatique. La discipline consistait à fabriquer des vers virtuels, chacun avec un code génétique programmé, puis d’observer leur comportement. C’est à ce moment que son invention franchit un nouveau cap.
Il découvrit qu’il pouvait dresser les vers, et les faire circuler dans son réseau d’aluminium. Il avait tant amélioré sa technologie, tant miniaturisé ses éléments, que de bestiole tentaculaire, l’amstrad était redevenu un clavier anodin, dont personne n’aurait pu deviner la puissance : la machine écrasait à plate couture les plus puissants PC modernes, les plus gros synchrotrons moderne. Grace à elle, et grâce à l’aide des vers, Gilbert se livrait à des expériences de plus en plus poussée sur la physique des particules. Au fil de sa vie, sa compagne s’etonnait de le voir si attaché à cette antiquité, qu’il refusait d’abandonner quoiqu’il arrive, où que les déménagements les emmènes. Il l’emballait toujours avec les plus délicate précautions, et elle se demandait pourquoi il faisait preuve d’un tel fétichisme. Personne ne savait.
Arriva un soir d’orage. Il venait de rentrer du travail, et comme sa femme et son fils était endormis, il alla dans son bureau pour y mener de nouvelles expériences avec la machine. Mais alors que la séquence se déroulait, la foudre s’abattit sur la maison. Un grand bruit fracassa la nuit.
Soudain, l’atmosphère tout autour de lui devint pesante. Il eut juste le temps de fermer la bouche, avant que l’eau ne s’engouffre dans ses poumons. Dans un vaste volume liquide, il flottait. Il jeta un regard vers le bas, et se mit à nager à toute vitesse vers une hypothétique surface. Des tentacules noirs léchaient ses baskets.
Hors du bassin, il s’en éloigna rapidement. Les bras visqueux sortaient à la surface, cherchant à l’aveuglette la proie qui venait de lui échapper.
Trempé, essoufflé, estomaqué, Gilbert regarda autour de lui : un paysage bleuâtre et gris dessinait ses formes tourmentée à perte de vue. C’était une sorte de canyon désert, où d’immense stalagmites sortaient du sol pour s’élever à des dizaines de mètres au dessus du sol. Les montagnes, au loin, avaient des courbes aiguës qui évoquait la mâchoire inférieure d’une énorme bête. Pas de végétation, en tout cas, rien qui ne ressemblât à un arbre commun. Dans la voute céleste, d’un indigo profond, se suspendaient deux lunes. L’une était de proportions similaires à l’habituelle, l’autre énorme, volait à basse altitude, menaçante et de mauvaise augure. Gilbert, ne voyant pas quoi faire d’autre, commença à marcher.
Alors qu’il avançait, et qu’il séchait , il se mit a fouiller dans ses poches. Il avait encore ses papiers, ainsi que les clés de sa maison. Il fut pris d’un grand frisson quand il prit conscience que les verrous qu’elles ouvraient étaient peut-être à des années lumières de la où il se trouvait, s’il était encore sur le même plan dimensionnel. A la pensée de sa femme et de son fils, les larmes lui montèrent aux yeux. Mais elle n’eurent pas le temps de sortir, car dans son autre poche, Gilbert découvrit un étrange accessoire, qui avait du se téléporter avec lui pendant le coup de foudre. C’était une petite boite, de la taille de la paume de la main. Il y avait trois boutons, et un petit écran à cristaux liquides. Sur l’écran défilait un message :
« Bonjour Gilbert, nous sommes les vers que tu as créé. Nous ne savons pas plus que toi où nous nous trouvons, mais sache que nous ferons tout pour t’aider. Garde cette boite précieusement, elle sera utile en temps voulu. Monte sur ce rocher en forme de tour, devant toi, tu y auras une meilleure vue d’ensemble. »
Gilbert, qui gardait toujours son sang-froid, ne se fit pas prier. Avec agilité, il escalada le python de pierre. Devant lui, un panorama grandiose se dévoilait. Le monde où il avait atterri était plus étrange que tout ce qu’il avait pu revé, mais au milieu des formes incongrues du relief, il reconnu au loin, à plusieurs jours de marche, ce qui ressemblait à une ville. De la fumée sortait des toits. Une forme de vie intelligente vivait ici.
Malgré sa détresse, Gilbert sourit. Pour se sortir de cet extraordinaire endroit, il allait devoir apprendre à survivre. Apprendre beaucoup de nouvelles choses. Et apprendre, il adorait ça…

(à suivre ?)

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