Texte à l’arrache 216

 Dans Textes à l'arrache

Angus avait raccroché sa guitare, pour se lancer dans l’élevage de chinchillas, avec sa femme. Elle, c’était une rencontre au détour d’un sous-bois, comme quand on va aux champignons. On flane sans s’étonner, avant que soudain, la mâchoire se décroche devant un diamant noir. Le hasard avait jeté deux dés dans la forêt, et les deux dés, c’étaient eux. Un double un.

Du soir au matin, ça beuglait dans leur maisonnette perdue. Du punk, du rock, de l’électro, surtout du blues bilieux et révolté qui avait donné à Angus de sauter sur un pied tout ce qui lui resterai de vie. La vie avait bien voulu durer. Les vestiges de son ancien boulot marronnaient joyeusement par les enceintes de la chaîne hi-fi. A plein volume, à toute berzingue. Les feuilles, à l’extérieur, au sol ou dans les arbres, tremblotaient en cadence. Les sangliers détalaient à quatre kilomètres à la ronde, mais à part eux et quelques oiseaux jaloux, ça ne gênait personne. Il n’y avait pas de voisins. Les chinchillas, malgré le boucan et leurs grandes oreilles, ne disaient trop rien.

Ça ne lui manquait pas, l’autre fois. Les autres avaient compris son envie de fuir. Du coup, par bonheur, la musique ne l’écœurait pas. De temps en temps, il remontait sur scène, le temps d’un concert. Les fans étaient heureux, lui aussi. Comme jamais.

Le soir, elle et lui s’asseyait dans le canapé craquelé de leur grande pièce. Ils restaient comme ça à écouter. Un morceau de Wipers courait autour d’eux.

-Angus, jeune. On l’est encore, c’est dans le cœur, n’est ce pas ? S’exprima son bijou tendre. Lui laissa sa tête faire du rocking-chair, avec un sourire de bon paysan, et se contenta de la regarder de ses petits yeux empattés de rides profonde. Le silence se poursuivit.

Puis, il se leva doucement, sans déranger. Il se dirigea vers le comptoir, l’inspecta, vérifia que de la chaleur dormait encore dans la bouilloire. Ce qu’il cherchait, c’était la tasse de sa femme, il l’avait trouvé. Il s’en saisit, piocha un sachet, jeta le vieux, arrosa le mug, puis rapporta sa création, fier comme un écolier qui ramène de bonnes notes à sa mère. Elle, elle attrapa son thé. Ses gestes délicats et son visage attendri racontaient son bonheur, réalisé avant même qu’elle ne le désire.

-Merci, mon amour.

Angus pointa du doigts le morceau qui finissait de s’agiter. Il respirait la fierté de quelqu’un qui comprend l’agencement parfait de l’instant présent.

-C’est télépathique. Comme la chanson le dit.

Leurs sourires s’emmêlèrent.

 

 

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