Texte à l’arrache 261

 Dans Textes à l'arrache
le texte à l’arrache qui arrache :

Ça commençait en comédie sur l’inceste, avec des curés pédophiles qui trafiquaient de la cocaïne, puis ça se poursuivait avec des migrants morts échoués sur la plage, en protestation contre le mariage pour tous. C’est parce qu’on avait retrouvé étouffé, un fœtus emballé dans un préservatif féminin. Il se prostituait pour financer son départ en Syrie On s’est dit qu’il fallait faire quelque chose, alors on a organisé une grande collecte au profit des chanteurs des enfoirés, mais c’est parti en sucette quand les sans-abri ont foncé vers le buffet au volant d’un trente trois tonnes qu’une chaîne d’information avait laissé à disposition à cet effet, sur le parking. Après, ça a tourné au documentaire dramatique, quand les footballeurs ont fait l’amour avec les vedettes de téléréalités, qui s’avérèrent être des mineurs trisomiques. Indignation générale, surtout que plusieurs mongoliens, sinon tous, étaient candidats aux primaires secondaires des présidentielles, sous la bannière du parti nazi-populiste « En Avant Guingamp ». Suspens… Ils avaient reçu cinquante-trois vaccins, d’autre aucun, mais ils développaient quand même la grippe A. Les ménagères crachaient au visage des infectés, quand elles les voyaient défiler contre la hausse des aides sociales. Alors, ils furent violés sur Internet, moyennant finance, et le président des Etats-Unis déclara qu’il s’agissait de fausses informations. C’était pas le moment, les imams s’étaient mis au tourisme sexuel, et les djihadistes voulaient envahir le Poitou. On avait tellement peur qu’on convint d’un triple état d’urgence à vie. Heureusement, Lady Gaga produisait le nouveau disque de Jul, fraîchement élu académicien, « Pren moi avek un abribus« , featuring PLS et Julien Clerc. On a eu peur à nouveau. Grave peur. On nous prenait sciemment pour des andouilles, mais on avait trop la frousse d’un chaos inconnu. Alors on restait dans le chaos habituel, avec des gens torturés pour de l’argent, qu’on saoulait pour qu’ils supportent, tout en leur disant qu’ils allaient en mourir, les méchants. On a fourré des blinis dans le fondement de jeunes artistes aux voix tordues, en expliquant que c’était bien, malgré que ce soit abject. Les pubs nous faisaient espérer le bonheur dans les petits pois, ce qui rendait certains tellement fous qu’ils laissaient les cadavres de vieux délaissés se décomposer dans les salons. Les fonctionnaires qui s’en moquaient, attrapèrent tous des maladies bizarres, des bubons sanguinolents, des fistules purulentes, des polypes au nez, des phlébites invincibles, et ne surent plus quoi faire pour sauver leur salaire. Fallait usurper un max de thunes, pour avoir le droit d’écrabouiller des starlettes dans des presses hydrauliques, avant de s’envoler en classe affaire pour Moorea, où on pouvait se droguer tranquillement en explosant des pastèques de canaques au Colt 44, comme l’inspecteur Clint Eastwood, qui était bien un des rares à vouloir faire la différence entre réalité et fiction. Bah, on s’était tous dédoublé sur la toile, on pouvait donc bien s’assassiner, se démembrer et se voler en rigolant. Mais grâce au changement d’heure, on revenait au vrai mouvement de la planète, et on pouvait faire la grasse matinée, à rêver de putes en Cadillac et de cons trucidés. Ça volait a deux centimètres au dessus du gazon. Là, j’ai tout éteint, j’ai mis des coups de battes sur tout les écrans, j’ai défoncé le cerveau du téléphone, ça en mis partout, de la bouillie de chair électronique. Je suis parti loin loin loin, chercher l’ailleurs meilleur. Mais quand j’y suis arrivé, c’était tout pareil. Alors, j’ai lu une bande dessinée de Benoit Brisefer, en mastiquant des merguez au wasabi, après  je suis allé voir Shiloh, en clopinant, c’était cool, il y avait les copains, ça m’a rassuré sur la réalité, ça semblait tangible, puisque le merlot m’est immédiatement monté au cerveau. En attendant, j’ai lu l’édito du Vortex, ça m’a fait penser à un Artaud ressuscité. Du coup, j’étais content. Mes yeux voyaient sans voir, comme d’habitude, mais mes oreilles entendaient ce qu’il fallait entendre, c’est à dire les contorsions de Cedric, et sa Squier par laquelle le souffle de vie sortant des amplis expulsait la voix rogomme de ce blond cavalier, et les rythmes obsédants tressés par Manu aux beaux favoris. J’étais reconnaissant qu’ils ouvrent ainsi les déversoirs émotionnels, pressant mon torse comme au temps des bistrots du bout du monde, quand la sueur de joie pleuvait sur eux et le public. Je jouissais, assis, de m’enfermer en dedans de moi, pour ressentir l’extérieur, cette vibration fondamentale qu’il faut accepter si on veut la goûter. À la fin, les baguettes transformées en éventails, et les accords d’orgue à cordes créaient une harmonie d’outre-monde, sublimée à son paroxysme par une fille qui hurlait de joie à la vision de ces pionniers, venus d’une dimension de far-west granulée de sépia. Rien n’avait changé dans la salle, à part pour quelques graffitis et moisissures supplémentaires. Dans l’obscurité, le corps chaud de Gin confirmait la sensation bienheureuse d’un super concert. Le retour à la nuit clinquante du cour Lieutaud, jusqu’aux escalators vers le foyer, s’est fait dans cette brume oubliée des caboches pilonnées aux décibels curatifs. Je savais que demain, le texte recommencerait du début, le texte de la routine effrayante, mais la Peur, pour l’instant, avait fichu le camp…

(Photo par Gin. Petit clin d’œil à Shiloh, que j’ai enfin vu pour de vrai ! nda: voir texte à l’arrache 129.)

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