Texte à l’arrache 346

 Dans Textes à l'arrache

Hey Marseille, tu as quoi, là, sur ton mur ?

« Ph’nglui mglw’nafh Cthulhu R’lyeh wgah’nagl fhtagn« .

Ca y est alors, les poissoniers du port vont sortir au grand jour ? Ils vont mener une odeur de sable et de filets mouillés sur toute ta personne. Des demi-poulpes vont sortir de ta vieille vase verte, des hippunks (nda : voir texte à l’arrache 191) , des moutons morts, des pingouins mystiques, des Johnnys incarnés en ongles, des cadres de vélo, des bouteilles de pastaga remplies de boue, des os de marins et de phoques moines, des trésors nazis, des gri-gris sénégalais, la couronne de Saint Exupery, des bars et des congres carnivores, des putes et du mazout, des monstres du monde à l’envers de 1987, tout cela va attaquer les narines sensibles. Ouais. Ça ne te suffit dejà pas d’être comme ça ? Fagotée comme une enterrée vivante, avec tout ses bijoux précieux, grignotée par les vers ? Tu ne comptes que sur le bleu integral de ton ailleurs pour faire le boulot. Je m’en fous, je t’aime, malédiction, je t’aime. Qu’as tu mis dans cette eau pour m’avoir fait ramper le long de tes rues ainsi ? A regarder les arcanes secrètes qui se moquent de nous au sommet des immeubles, ces statues, ces gargouilles, ces saints et ces vierges immobiles, doigts levés et bras ouverts, ou ces têtes de passes-murailles contrariés en pleine traversée, si calmes pendant que sous leurs yeux sans iris, les coups pleuvent sur un corps recroquevillé ? L’odeur de poiscaille, elle est déjà présente, et se sent jusqu’à Manosque. J’aimerais être Aloysius Bertrand et te rendre ta beauté, mais tu n’es pas Dijon, meme si la rue où j’habite ressemble à une allée du douzième siècle . Après tout, je m’en  moque, tu n’es que mon petit univers. Avant, j’ignorais que j’en etait dejà prisonnier. Un univers ou la limite se marque à la rue des trois frères Barthélemy, encore charmante de platanes et de dômes haussmaniens, et de l’autre coté à la rue de la loubiere, qui suit le cours de sa rivière. Un cancrelas nostalgique de ses tribulations d’autrefois, rode dans ce périmètre, en boitant derrière un chien. Regarde-moi dans les yeux pour savoir de qui je parle. Ce n’est qu’un petit monde de Kafka, crasseux, bancal et sécurisant, à l’horizon sur lesquels des voitures se garent mal et des chiens géants chient sur les pigeons morts. Soit. Il y a les gabians qui apportent quand meme un peu de mer sous leurs pattes. Ça, ça va. Et puis il y a quand je descendais la rue Thiers, et que le parvis des Réformés ouvrait la ville comme une veine du coeur, lancant la Canebiere moche sur le blanc des bateaux, j’avoue, je respirais. Et où que j’allasse dans l’hyper centre, les pointes de l’eglise et la forêt de mats etaient mes pôles d’orientation. Ces vaisseaux sanguins ras le tube de globules , où je me laissais porter par le flot des gens allants à leurs affaires, aux abordd d’un souk ensoleillés et d’odeurs de héné. Si je me risquais dans le Panier, en montant par les escaliers de la place Sadi-Carnot, pres de la direction de la Marine Marchande, je voyais des bagnoles brulées, des junkies en train de se fixer, et puis des ruelles sans age. Là où il y avait des huttes, les poissonniers y avaient commencé à comploter, c’est là que j’ai vu les premiers graffiti, on y revient. Maintenant, il y en a jusqu’au rond-point du Prado, meme sur le stade. Putain, le stade. C’est comme de violer un taureau sacré. Oh non, c’est trop impur. Parlons plutot des sacs plastiques. Ils nichent partout sur les arbres des places, des aux Huiles à la Plaine, c’est comme s’ils étaient vivants, qu’ils volaient, qu’ils migraient, bof assez de tout ces palpitants effets. Ça m’arrivait des fois de passer pres des murs antiques de la ville, enterrés sous le destroyer inifugé qui se nomme Centre Bourse. Ça me rend encore triste de penser à ces petits parpaings au milieu du gazon, et la petite maquette explicative que je parcourais de l’index sale de mon enfance. Dire que tu as connu ces gens, toi. De chair et de sang ils étaient. Et oui, ils partaient de leurs petites cabanes de terre. Ils passaient devant la calanque du Lacydon, saluant les pêcheurs au passage, puis ils partaient sur des sentiers de verdure sèche, là où aujourd’hui tu as accumulé les plis de bitume. Cette armure de pierre parcourue de long en large par des poux à roulettes, jusqu’à leurs forteresses inviolées qu’ils ont fait sortir de cette bave dure. Je sais, je parle beaucoup aujourd’hui, mais c’est la dernière, avant que les Grands Anciens ne viennent t’accueillir dans leur club. Passe une bonne nuit, donc, et fais de beaux rêves. Garde les miens au chaud de ta memoire.

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