Texte à l’arrache 361

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Gilbert dans un autre monde. Episode 3. Final.

(Résumé du texte à l’arrache 248: A cause d’un Amstrad CPC trafiqué et d’un orage, Gilbert, informaticien de la Ciotat, s’est retrouvé transporté au fin fond de la Picardie sauvage. Après de nombreux périls, il a finit par être recueilli par l’ermite Saint Dalmatien, qui lui a promis de l’aider à rentrer chez lui…)

Gilbert apprécia l’hospitalité de saint Dalmatien, toute simple, mais pleine d’attention. De son gourbi, il ramena une boite de biscuits apéritif poussiéreuse, qu’il offrit à son hôte, en lui expliquant qu’il la conservait pour les invités. Cette humanité au fond d’un trou picard ému notre héros. Il n’avait jamais mangé de tucs aussi bon de toute sa vie. Quant à son accident, il paraissait maintenant clair que la combinaison de la foudre avec l’ Amstrad avait téléporté Gilbert à quelques centaines de kilomètres de chez lui. Concernant le paysage biscornu et les créatures bizarroïdes, le gnostique répondit par un « par chez nous, c’est tout comme ça » laconique.

Rassasié, soigné et reposé, Gilbert, accompagné du saint, repris son chemin vers sa maison. Dalmatien le guida à travers champs, jusqu’à une borne qui délimitait la frontière entre cette campagne loufoque et un désert aride.

-Je m’arrête là, dit l’ermite. Au delà de cette limite, tout le monde me traite de pédophile et me poursuit en voulant ma mort. C’est à cause de cette grosse croix que je porte (il saisit l’énorme crucifix qui pendait autour de son cou, et le montra ostensiblement). Toute ces affaires sordides ont fait que le christianisme à très mauvaise presse. Moi, je n’veux pas d’ennuis, mais eux (son doigt pointa l’horizon) m’en font. Et si je dis que je suis oecuménique, ils prennent ça pour un gros mot, et ils sont encore plus énervés.

Le saint se mit à maugréer dans sa barbe des choses incompréhensibles. D’un coup de coude poli, Gilbert lui fit comprendre qu’il attendait toujours qu’on lui indiqua le chemin.

-Oh oui, pardon pardon ! S’excusa le clodo canonisé. Ehm… Alors, ne flippe pas pour ce désert, il finit derrière la dune, là bas. Tu n’as qu’a passer de l’autre côté. Tu trouveras une petite ville, où ils sont un peu moins dégénérés que ceux que tu as vu l’autre fois. Enfin… Ceux-la ont un corps.

Gilbert remercia chaleureusement Dalmatien pour son aide. Le vieux sage fut un peu surpris par tant de politesses. Pour une fois, on était courtois avec lui, sans que cela n’ait pour but de le duper. Les yeux humides, ils fit un grand geste de la main à Gilbert, qui marchait déjà dans le sable.

Pendant qu’il traversait, un homme tout nu, et qui ressemblait traits pour traits à Sean Connery, se présenta. Il s’appelait Zardoz, celui du texte à l’arrache 9. Une horrible machine en forme de ciseaux avait découpé son slip d’aventurier, et depuis il errait, les burnes à l’air, avec l’espoir de sortir de ce pays désolé. Il rougit et baissa les yeux de honte sur ses parties touffues, ballottantes tristement sous les vents, quand Gilbert lui montra le chemin de la sortie. En moins de temps qu’il n’en faut pour un poil de toucher le sol, la pampa aride redevint de la bonne vieille cambrousse eud’chez nous, et ils arrivèrent à l’entrée d’une bourgade endormie, celle dont avait parlé Dalmatien. Zardoz prit congé, et s’en alla, les fesses à l’air, chercher un fripier quelconque.

Sur la place principale, Gilbert avisa une maison dépareillée. Elle était construite à la manière bavaroise, et une pancarte posée près de l’entrée affichait ces termes : « PIENFENUE » suivis d’une flèche invitant à pénétrer dans l’édifice, ce que fit notre ciotadin loin de son foyer.

L’intérieur était une grande salle, pleine de tables et de chaises. Une auberge, se dit Gilbert. Mais une auberge vide, plus vide que le porte monnaie d’un migrant. Au comptoir, il aperçu deux hommes en uniformes cintrés. Il ne faisait aucun doute que ces vêtements avait été taillé par Hugo Boss. Notre héros se sentit immédiatement mal à l’aise, et une inexplicable envie de résister à quelque chose monta en lui. Trop tard, l’un des deux hommes le remarqua, et lui fit un large, un immense, un magnifique sourire rempli de dents parfaites.

-Ponchour ! Zoyez le pienfenu ! Che vous en prie, asseyez-fous !

La joie chez cet homme grand et sec comme une trique était tellement sincère, que, tel un somnambule, Gilbert tira une chaise, et s’assit.

-Euh… Bonjour. Pouvez me dire quel est cet endroit, monsieur ?

Le personnage passa de l’autre coté du comptoir, et s’avança vers lui, au pas de l’oie. Ce militaire dégageait un air de rigidité qui dénotait totalement avec sa face, aryenne certes, mais avenante.

-Pien sur, pien sur. Fous fous troufez ici à l’auberche internazionale des nazis chentils !

-Des Nazis… Gentils ???

-Javohl ! Nous admirons notre FÜHRER ! en tant que stratèche, et styliste. Regardez ces fringues, elles sont züber classes ! Mais nous troufons qu’il était trop méchant afec les chuifs, et tous les autres, par egstention. Nous autres, nazis chentils, nous aimons TOUT’ le monde, quelque soit l’orichine, la gouleur de peau, ou les bréférences zegzuelles. Nous ne foulons que la paix et l’amour entre les Hommes, mais néanmoins afec une zertaine DIZIPLINE ! C’est pourquoi nous appliquons la tolérance zéro à l’INTOLERENZ !!!

-Herm… Et euh… Ca marche votre parti ?

-Nein, za ne fa pas drès forte. Mon ami Helmut et moi-même, (endre barenthèses, che m’appelle Hermann), discutions t’une noufelle stratéchie afin d’intéresser les chens à nous. Fotre fisite tombe d’ailleurs à pic, fous allez poufoir nous dire ce que fous pensez de notre noufelle idée !

La gentilesse d’Hermann était si effrayante, que Gilbert se contenta d’opiner, pour lui indiquer de continuer.

-Gut ! Alors foila : Bour faire de la bublicité, on mettrait ein grosse étoile chaune zur le mur egzterieur, bour faire ein klein peu kowboy, ja ? Tagada tagada, Walker Texas ranger, ja ? Afec le mot « chuif » égrit tessus. Ce serait une façon ricolote de tire à nos amis sémites gu’ils zont les pienfenus ! Amuzant, n’est-ze pas ?

-Che… Je ne sais pas, cela risque peut-être d’être mal interprété, dit le sudiste.

-Ach, tu fois gue ch’afais raizon, ajouta Helmut d’une voix de fausset (c’était un petit gros replet), les chens ne font pas komprendre !

Hermann prit une pose tragique.

-Ach, Unglück ! Enver et damnazionne… Helas, che tois me zoumettre à la decizion de la machorité. Pon. Oh, mais, che zuis de la ternière impolitesse, monsieur, che ne vous ai même pas temanter si nous poufions fous aider. Fous afez l’air perdu !

Gilbert sauta sur l’occasion, et narra ses mésaventures avec tant d’éloquence et d’émotion, que les nazis gentils, bouleversés par ses malheurs, lui proposèrent tout de suite de l’emmener à la gare d’Amiens, pour qu’il puisse rentrer chez lui. En vrai gentilshommes, ils lui payèrent même un billet de première classe. Gilbert songea un instant à offrir ses vers informatiques dressés aux deux champions du point Godwin, mais se ravisa : il craignait que ce présent ne pervertisse leurs bonnes volontés. Sur le quai, Hermann et Helmut lui firent des adieux éplorés, sous les regards inquiets des voyageurs.

Le voyage se fit sans encombre, si ce n’est deux ou trois incident techniques qui se jetèrent sous la locomotive pendant le trajet. Gilbert revint enfin à la Ciotat, où il retrouva sa femme et son fils, fous d’inquiétude. Pour remplacer sa machine, il se contenta de se fabriquer un raspberry pi avec une coque amusante. Depuis, il vit heureux.

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