Chant Vingt-Deuxième

 Dans L'Enfer de Dante

(Résumé : enfer, huitième étage, rayon falsification. Dante a fait connaissance avec les malebranches, les démons chargés de tourmenter les pêcheurs. Une belle bande de psychopathes, ces zozos. Heureusement, Virgile, qui a toujours les choses en main, a réussi à persuader les affreux de leur servir d’escorte. Apres un petit spectacle de pétomanie, la troupe reprend la route. Que va t’il arriver à nos deux joyeux drilles ?)

Chuis un gars du moyen-âge, moi. J’en ai vu, des cavalier se lancer pour engager le combat, pour mener la revue, ou même parfois pour s’enfuir, yep. J’en ai vu des soldats courir sur nos terres toscanes, j’en ai vu rôder, des maraudeurs, et commencer des tournois, ou des joutes, pour sûr. C’était soit au son des trompettes, soit à celui des cloches et des tambours, parfois c’était des signaux envoyés par les châteaux, de la fumée, de la lumière, que sais-je… Des trucs qu’on fait par chez nous, et ailleurs aussi. J’en ai vu, des bateau naviguer grâce aux signalétiques sur  laterre, ou grâce aux étoiles… Mais là… Jamais vu un truc pareil. Une escorte si pétaradante, sans jeux de mots…Non, jamais vu un tel escadron accompagner un cavalier, un piéton, ou un rafiot…

On était chaperonné par dix démons (des bikers n’auraient pas été une plus terrifiante compagnie), mais bon… Comme on dit en enfer : « mieux vaut être mal accompagné que seul ». Pendant ce temps, j’ai regardé le pétrole, pour m’acclimater à la bolge, et voir ceux en train de brûler dedans. De temps en temps, il y en avait un qui sautait à la surface, puis retombait dans la poisse en un éclair, comme un dauphin qui fait coucou aux marins. Sur les berges, se vautraient une multitude d’ombres moisies, pareille à des crapauds, la tête dehors et le reste dans l’eau. Quand Grossebarbouze s’est approché, elles se sont grouillées de grouiller dans le pétrole bouillant. J’en ai vu un (misère, quand j’y pense, mon cœur en frémit encore) qui attendait comme ça, comme une grenouille a plat ventre derrière une autre qui plonge. Groclébard l’a chopé par les cheveux, l’a tiré dehors, et l’a envoyé valdinguer : ouaïeaïeaïe, j’ai bien cru voir une loutre volante passer sous mes yeux !

J’avais noté le nom de tous les diables avec nous, quand ils avaient été sélectionnés, et maintenant, je faisais gaffe quand ils s’interpellaient entre eux.

-Yo, Grorougeaud, vazy, fais ton barjot ! Enfonce lui les ongles dans le dos, écorche le ! Braillaient-ils comme des hooligans.
-Maître, vous pourriez me dire qui est le misérable fou en train de se faire mettre en pièce ? Du moins, si vous savez.

Mon Guide s’est approché de lui, et lui a demandé d’où il était.

-Oui, ouille… Je suis né dans le royaume de Navarre, m’sieur. Mon père était un bon à rien, destructeur et auto-destructeur. Ouch. Et ma mère m’a mis au service d’un seigneur quand j’étais tout petit. Ensuite, j’ai été domestique du bon roi Thibaud, mais à partir de là, je me suis mis à frauder tellement que maintenant. Hii. je me retrouve à le payer cher dans ce feu. Arg.

A ce moment là, Grosseporcasse l’a tailladé avec les défenses qui lui sortait de la bouche. Le domestique a eu l’air de bien le sentir. La souris était cernée par les chats, si je puis dire. Grossebarbouze l’a saisi dans ses bras.

-Garez-vous, j’vais l’enfourcher ! Il a dit.

Il a tourné la face vers le maître.

-Si tu veux encore lui poser des questions, c’est le moment, mon pote. Parce que dans deux minutes, ont va l’ouvrir en trois !
-Brrm. Bon… Parles nous donc des autres coupables. Tu en connais, sous ce pétrole ? Personne d’Italien, la vérité ?
-Je viens d’en quitter un à l’instant. Aïe. Il est pas loin. J’aurais mieux de rester là-dessous, ça m’aurait évité les griffes et les crocs de boucher. Gnnn.
-C’est bon, oh, on attend plus, a dit Gromytho.

Aussi sec, il lui a planté son croc dans le bras, et en a emporté un gros lambeau. Grossebouffe a voulu en profiter aussi, en lui fauchant les jambes. Ces deux excités ont grave agacé Grossebarbouze. Après que les deux se soient un peu calmé, mon Guide en a profité pour interroger la victime, encore choquée par la gravité de ses blessures.

-Alors, cet italien avec qui tu causais, avant qu’on t’extirpe, comment s’appelait-il, la purée de ta cousine au deuxième degré ?
-C’est Frère Gomita de Gallura, un cador de la fraude à grande échelle. Il tenait même les ennemis de son maître en son pouvoir, au point qu’ils en faisaient tous l’éloge. Ils les a complètement dépouillé, les a laissé à poil sur le carreau, sans rien, zeubi. Dans toutes ses autres combines, c’était le roi du pétrole… Façon de parler…. Il cause souvent avec Michel Zanche, seigneur de Logodoro, ancien premier ministre de la Sardaigne. Oh pauvre, la Sardaigne, ils ne parlent que de ça tout le temps, franchement des fois ça… Oh purin ! Voilà l’autre qui se remet à grincer des dents ! Gasp ! J’adorerais vous parler encore, les pincos, mais je crois qu’il va encore me gratter sous la peau, hiiik !

Grossebarbouze s’est tourné vers Gronain, qui s’apprêtait à frapper un grand coup.

-Du large, vilaine volaille !
-Euh, si vous voulez, en profita pour nous dire l’effrayé, je peux faire venir plus d’italiens. Toscans, Lombards, ce que vous préférez. Mais ce serait mieux si vous pouviez faire en sorte de tenir ces Malebranches à l’écart, qu’ils ne leur rétament pas la gueule à vue. Moi, je n’aurais qu’a rester assis ici. Il me suffira de siffler, à l’ancienne. Je peux en faire venir jusqu’à sept d’un coup.

A ces mots, Grochonchon a levé le museau en secouant la tête.

-Ouah l’aut’ hé ! Z’avez entendu comme il essaye de nous la faire à l’envers pour se planquer ? Qué petit malin.
-Et oui, je suis trop malin quand il s’agit de faire souffrir mes connaissances, a répondu l’ombre.

Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai remarqué qu’il était plein de liens. Gropoulet ne s’est pas retenu comme les autres démons.

-Vazy, plonge… J’ai tout mon temps. Je battrai des ailes sur le pétrole, tu verras. Ok, la troupe, on laisse machin au bord, nous on va plus loin, derrière la berge. On va voir si tu es plus fortiche…. Chte chope avant que tu touches l’eau, chiche. Allez, plonge.

Ami lecteur en train de lire, imagines un peu le jeu. On s’est posté, puis on a tous regardé de l’autre coté, vers la rive. Sur le bord, le navarrais a bien pris son temps, a bien campé les pieds, puis, en un clin d’oeil, plouf! A plongé dans l’eau avant que les autres puissent remuer le petit doigt. Les affreux diables avait l’air contrariés comme des moulins à vent, surtout Gropoulet. Mais il ne s’est pas démonté pour autant : il s’est tout de suite élancé.

-Grmblbll. J’te tiens !

Peine perdue. La proie était plus rapide que le prédateur. Le navarrais a disparu sous l’eau, tandis que Gropoulet, rasant le pétrole, a reprit de l’altitude, la poitrine dressée comme un faucon vexé, parce que le canard a plongé trop vite. Les autres démons se sont moqués de lui. Ça ne lui a pas trop plus, à Gropoulet. Sitôt le perdu sous les flots, il s’est jeté sur Grogivré pour le cogner. Au-dessus de la fosse, c’était la foire d’empoignes. Mais les deux étaient expert en lacération, de vrais éperviers, et ils sont tombé dans l’étang bouillant. La brûlure les a fait aussitôt se lâcher, mais ils n’arrivaient pas à se relever. Leurs ailes étaient engluées comme celles d’une mouette après une marée noire. Grossebarbouze, tout aussi dépité de son coté, en une seconde, a harponné quatre des siens, avant de les envoyer bouler aussi dans le pétrole. Les diables qui restaient, excités comme des puces, se sont jeté sur les empoissés, déjà cuits dans la croûte. Nous, on en a profité pour laisser en plan ces empâtés.

(Texte original : en italien, en français)

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