NAPALM DEATH [ UK ] + DROPDEAD [ US ] + Guests @ Marseille.
La puissance du grindcore et autres genres de musiques extrêmes ne réside-t-elle pas dans son pouvoir cathartique ? Voir des gens s’énerver très fort à ma place, ça m’apaise. Toutes les mauvaises vibrations, la colère, l’agacement, la rancœur, la frustration, l’aigreur, l’angoisse, la peur, tout cela s’en va pendant la communion groupe/public, qui comme dans un sabbat d’enfer, fait vomir ses boyaux crasseux à tout le monde pour s’en servir de lasso que l’on fait joyeusement tourner au-dessus de sa tête, entre un grondement de bête primale et un saut de la foi depuis la scène. Le paradoxe du phénomène est que l’on ressort de là purifié, tout à fait prêt à aimer son prochain de la façon la plus christique qui soit, c’est-à-dire en appliquant le fameux « soyez cool les uns envers les autres » qui manque à tant d’individus (par ailleurs souvent du genre Homo Christianus). Paradoxe encore, puisque les formations ce soir présente revendiquent insurrection, terreur, et foutage en l’air des conventions petite-bourgeoises les plus dégoutamment étriqués ou bien-pensantes.
En résumé : Escuela Grind, mené par une chanteuse kinétique, râpent méchamment le sol et le sommet des cranes en nous rappelant que l’amour ne connait ni loi, ni frontière. Siberian Meat Grinder, venus des steppes froides, chantent les vertus réchauffantes de l’amitié entre les copains-copines de bonne volonté. Dropdead, dont le set fait de super violence rappelle un météore de pégase sans fin, sont peut être les plus antinomiques : entre deux éjaculations frénétique d’acide sulfurique bouillant et tournoiement dangereux de son micro-jack, le chanteur nous invective pour dire : « si vous avez un chat, un chon (nda : un chien), n’importe quelle petite bête chez vous, quand vous rentrerez chez vous, prenez là dans vos bras, caressez-là… parcequ’il ne faut pas faire de mal aux animaAAUUUOUUURRRRRRRRRRgGLLLAAARRR !!! » Quant à nos adorés et fondateurs Napalm Death, auteurs du morceau le plus court de l’histoire (cinq dixième de secondes, c’est au Guinness), ils ne démériteront pas non plus, malgré le pauvre chanteur Barney Greenway, blessé à la patte, contraint de faire le show assis, mais avec un Ô si grand professionnalisme, vertu déficiente chez bien des professionnel plus sanctifiés, que ça donne des frissons. Respect, Barney. Voir un mec génial dans le même état que moi, c’est à dire mort dans une jambe, cela m’a rendu leur show encore plus sympathique. Avec eux nous repassons tout en revue, au moyen de vociférations gutturales pas contentes, de riffs tranche-artères fémorale, de batterie épileptique bave-aux-lèvres : allez-vous faire voir la religion, les racistes, les machos, le conformisme apathique et ce système de travers.
On pourrait dire qu’il s’agit là d’intolérance à l’intolérance caractérisée, que ça se mord la queue, que ça s’annule à force de trop vouloir en rajouter dans l’excès, etc. etc. Cependant n’oubliez pas : catharsis. Libération affective. Indispensable dans un siecle de repli émotionnel numérique. Eh quoi, elle était trop excellente, l’affiche de ce soir, é-no-rme, points d’exclamation final !!! Oh, bien des chagrins, bien des rumineurs, bien des tristos feront une moue méprisante, en faisant dégouliner le jus de citron par la commissure de leurs lèvres troussées vers le bas, raillant le wokisme naïf de ces discours et rappelant l’incongruité de cette intransigeance citée plus haut, sans parler du raffut… À cela, plusieurs arguments à rétorquer : un. ce mouvement existe depuis bien plus longtemps que vous, deux. ils jouent mieux que vous, trois. sont plus intègres que vous, quatre. allez vous baiser vous même. Nazi punks fuck off. Voilà.
Une fois rentré chez moi, rincé, décrassé, remonté, guilleret, totalement affranchi de la haine, vide de courroux et rassasié jusqu’aux oreilles d’hématomes, lentement, sur la pointe des pieds, sans faire de bruit, je me suis approché du canapé, et là,
j’ai fait une grosse bise sur la truffe de Chonchon.
Peace.
C’était trop cool !!!!