Chant Vingt-Sixième

 Dans L'Enfer de Dante

(Resumé : encore et toujours paumés dans le maelström du Malebolge, alias le huitième cercle de l´enfer, Dante et Virgile en voient des vertes et des pas mûres. Rien que dans le chant précédent, ils ont observé deux cas de transmutation psychédélique tellement délirantes qu’elles ont donné un sacré fil à retordre au traducteur ! Maintenant, que va t’il arriver à nos deux camarluches ?)

 

Yahou, ma ville de Florence est tellement fameuse, qu’on la connaît sur terre et sur mer, et même en enfer ! Depuis le début de mon voyage, j’ai déjà rencontré cinq citoyens de ma cité : Cianfa, Agnello Brunelleschi, Buoso degli Abati, Puccio Sciancato et Francesco Guercio Cavalcante… Pas de quoi être fier, c’est même un peu déshonorant pour la ville en fait, m’enfin… De ce qui va t’arriver, Flo, j’ai eu plus d’une vision, dans mes rêves. Si seulement ça pouvait arriver tout de suite ! Plus le temps passe, et plus c’est dur à porter.

On a bougé. Mon Guide, en me traînant derrière lui, est remonté par les grosses pierres qui nous avaient servi d’escalier pour descendre, au début. On a suivi le sentier, en zig-zagant entre les falaises et les rochers éboulés. Comment c’était la zérmi, on pouvait pas faire un pas sans s’aider de la main.
Alors, j’ai commencé à déprimer, et je déprime encore quand j’y repense. D’ailleurs , j’évite de trop le faire, ça me fait me faire attaquer par mon moi taré par derrière. Dans ces moments là, je ne m’envie pas, c’est clair.

Quand les jours se rallongent, quand les moucherons laissent la place aux moustiques, le pécore qui regarde son champ et la vallée, la nuit, adossé à la colline, voit des milliers de petites lucioles. Le même visuel resplendissait ici, dans toute la huitième bolge, au moment où j’y ai pénétré.
Quand une fusée s’élève dans le ciel, et qu’elle est déjà très haute, on ne voit plus du réacteur qu’une petite flamme qui monte. Ici, il y en avait plein, de petites flammes, qui bougeaient dans la fosse. Chacune d’entre elles enveloppe des gens de mauvais conseil, mais elles brûlent d’une telle lueur qu’in ne les voit pas dedans
Je me suis penché, sur le pont, tellement en avant que, si je ne m’étais pas tenu à la corniche, je serais tombé comme une bouse.

-Dans ces flammèches, il y a des esprits. Ils sont habillés du feu de dieu, hihihi, a dit Virgile, qui me voyait super intéressé.
-Maître, j’ai répondu, vous me confirmez ce que je pensais, j’allais vous le demander. Au fait, vous avez vu ce feu ci ? Celui qui se dédouble au sommet ? Ça me fait penser à l’histoire de ce gadjo, Etéocle. On l’a brûlé sur un bûcher avec son frangin, mais les deux se détestaient tellement que la flamme s’est séparée !
-En effet, il y en a deux là-dedans aussi. Ulysse et Diomède, de rusés filous tous les deux. C’est la vengeance et la colère qui les ont emporté ici, oh oui. Ils payent pour l’avoir fait à l’envers aux troyens, avec leur coup du cheval de bois, sans compter leurs autres combines… Le premier livre d’histoire venu te renseignera mieux que moi, ba ba ba.
-Et ils peuvent parler, au milieu de toutes ces étincelles ? Siouplait, siouplait Maître, je vous en prie mille fois, on pourrais pas causer avec ce double cierge, je ne peux pas m’empecher d’être attiré vers lui.
-Ok, j’accepte, petit, tu es poli et tout, c’est bien. Mais sur ce coup, tiens ta langue et laisse-moi parler. Je sais ce que tu veux, mais ces deux-là ne parlent que grec, ils risquent de ne pas te calculer si tu t’exprimes dans une autre langue.

Quand la flamme a été assez proche, et que mon Guide a senti que c’était le bon moment, il a commencé à s’adresser à elle.

-Hey, les gars coincés dans le même fanion ! De mon vivant j’ai écrit sur vous, en vers en plus, la verité. Je mérite quand même un p’tit peu de discutailler avec vous, non ? Dites-moi donc comment vous êtes mort, et comment vous vous êtes retrouvé dans ce bled ?

La plus grande pointe de la flamme s’est mise à remuer. Elle bougeait de ci, de là, comme une langue en train de parler. En même temps, une voix à commencer à se faire entendre. C’était celle d’ Ulysse.

-Quand je suis parti de chez Circé (j’avais squatté chez elle plus d’un an), je ne pensais plus ni à mon fils, ni a ma femme, ni a mon vieux père. J’avais qu’une seule envie : parcourir le monde, découvrir de nouveaux hommes, leurs bons et mauvais côtés, voir du nouveau, quoi. J’ai pris la haute mer, avec un seul bateau, et quelques amis fidèles. J’ai tout vu de la méditerranée : l’Espagne, le Maroc, la Sardaigne… Tout ! Quand on est arrivé au détroit de Gibraltar, là où censément, Hercule a posé les limites du monde, moi et mes copains, on étaient déjà devenus de vieux croulants. A droite, il y avait Séville, à gauche, Ceuta. Et à ce moment là, j’ai dit « Allez mesdemoiselles, on a d’ja vaincu mille périls, c’est pas le moment de jouer les chochottes ! On passe le détroit et on fonce vers l’Inconnu ! Vous z’êtes pas n’importe qui, vous êtes des aventuriers, des baroudeurs, des durs, des vrais ! ». Je les ai tellement chauffé que je pouvais à peine les retenir. Barre à l’ouest toute, on ramait tellement vite qu’on aurait cru qu’on volait, à l’ouest, toujours à l’ouest. Dès la première nuit, je pouvais voir aux étoiles dans le ciel, qu’on était déjà passé dans un autre hémisphère, car celles qu’on observe d’habitude avaient toutes disparues. Ça faisait cinq jours et cinq nuits depuis notre départ pour le grand large, quand on a vu apparaître une montagne sombre, au loin, la plus grande que j’ai jamais vue. Au début, ça nous a plu, mais on a vite déchanté, parce que de cette nouvelle terre, il nous est arrivé une tornade droit dessus, que le navire à prit de plein fouet. On a tourbillonné trois fois, avec les vagues et les poissons en suspension, puis à la quatrième, la poupe vers le haut et les poulpes en bas, la mer s’est refermée sur nous. C’était le destin, faut croire…

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