Spectrum Deschamps Bdubd Spectrum Deschamps Bdubd en concert L’Embobineuse – Marseille 3 avril 2010

 Dans Chroniques de concert

Quand le viking vole bas, l’apéro commence tôt. Et le norvégien avait pointé le bout de son drakkar dès midi ce samedi. Il était d’humeur sombre, bien décidé à faire une razzia sur l’Embobineuse le soir même.
Commença donc une rigoureuse préparation de l’attaque. Chez les vikings, c’est bien connu, le guerrier ultime, c’est le berserker. Un gars qui cours à poil en hurlant , complètement dézingué, et capable de casser la tronche à un ours avec quelques galets. Pour en arriver la, le sujet doit absorber moult hydromel jusqu’à atteindre un certain point de rupture, qui va le plonger dans un état de transe meurtrière. C’est plutôt sympa.
Amateur d’ethnologie, je me pliait avec politesse au rituel, mais à 20h je me sentais plutôt prêt à faire une attaque éclair dans mon lit. J’aurais peut être du éviter de mélanger la culture scandinave avec la jamaïcaine, qui, même si elles s’accordent bien, restent antagonistes. Je sentais les deux lutter pour la prise de mon cerveau tout en montant à bord du drakkar.
Nous accostâmes dans un petit fjord aux abords de l’Embobineuse. Toujours cette anomalie perdue au milieu de nulle part, enclave de freaks résistants face aux lotisseurs de lotissements.
Le norvégien avait opté pour l’attaque furtive. Nous passâmes donc la douane déguisés en banc de saumons, et le stratagème fut payant. Nous nous engouframmes dans le vortex qui sert de porte d’entrée vers la salle…

1982. Après une première tentative avortée, les ordinateurs ont enfin conquis les foyer, et de jeunes doigts potelés s’activent sur de grosses touches de claviers. Le langage Basic règne en maitre, et les premiers geeks se réunissent en secret, pour organiser de longues coding party : on bidouille, on trifouille sa machine pour créer de jolies démos de toutes les couleurs, et on s’extasie sur la sphère qui sautille sur un scrolling en parallaxe rastérisé (si vous ne comprenez rien c’est normal, c’est le problème de l’Embobineuse, on arrive en vikings déguisé en saumons, et on se retrouve dans une coding party des années 80, avec une démo de sonic 2 qui tourne en boucle sur un écran, faut pas chercher à comprendre).

Ça faisait une bonne demi heure que je regardais l’écran, et le hérisson bleu n’en finissait plus de courir dans des loopings, quand le norvégien m’extirpa de mon coma. « viens, on va regarder le groupe » me dit il.
« ha bon y a un groupe qui joue ? » répondais-je candide en le suivant vers la scène.
Oui, il y avait bien un groupe qui jouait. Enfin plutôt une team de demo makers en train de bidouiller du sludge métal sur deux amstrad cpc.

A ce stade du récit pardonne moi, ami lecteur. Oui j’ai vu Bdubd, oui j’ai vu Deschamps. Je me suis laissé transpercer par les ondes envoyé par ces deux groupes. Je peux même témoigner que Deschamps était composé d’un homme et d’une femme, chabadabada. Mais, ami lecteur, je ne saurait te dire si c’est l’état délabré de mon cerveau embrumé qui m’a transcrit leur musique comme hautement léthargique, ou si c’est leur musique qui était valiumesque au point d’enfoncer plus encore ma conscience dans mes chaussettes.
N’oublie pas que comme beaucoup, je fait partie de ces gros cons qui vont voir de la musique parcequ’on leur à dit que c’était cool. Ensuite s’enclenche un compliqué processus de réactions chimiques diverses et d’influences culturelles variées, qui vont faire qu’a l’instant I je vais soit aimer, soit pas aimer, soit les deux. En tout cas, il m’a paru de mon devoir de retourner discuter avec les coupains le temps que Spectrum commence.

Avant même sa venue, le Norvegien me vantait les mérites du groupe, et la tronche d’ados bizarre du leader. Ce soir il était tout excité, trépignant sous sa casquette de tout ses poils roux.
A l’heure venue, on alla se mettre tout devant, et on finit le joint qu’on avait gardé spécialement pour l’occasion.
Pendant ce temps le groupe s’installait, ou plutôt, essayait de commencer. L’ex Spaceman 3 en polo, s’irritait de constater que 1: Son sampleur marchait mal. 2:personne ne comprenait rien 3: un navrant s’entêtait à gueuler « ROCK n ROLL » d’une voix de daim en rut, alors que non, monsieur, ici on était la pour écouter de la musique sérieuse.
Le Norvegien éructait d’avance, implorant des chansons par leur titre. « Tu vas voir » me prévint-il « Les premières chansons sont molles, mais après c’est la guerre ».

Retour en 1982. Pour 125 livres sterling, les anglais peuvent commencer à s’acheter une nouvelle petite bête: Le spectrum ZX. Noire, racée, et barrée d’un arc en ciel dans le coin inférieur droit. Il suffit de l’accoupler à un écran de télé, et shazam ! un monde en 4 couleurs apparait. Du jaune, du vert, du bleu, du violet. Aux confins de la galaxie, on joue à Arkanoid, et le beeper de la machine bibipe humblement ses deux paramètres, fréquence et durée. Tel un Velvet underground du futur, la mélodie est rachitique, en boucle. Et plus on avance dans les tableaux plus elle devient entêtante et hypnotique, et plus on continue, plus ça continue, et on ne veut pas que ça s’arrête parceque sinon, il faut tout recommencer, et on aura pas droit à l’explosion de couleur finale, alors qu’on ne veut qu’une chose, c’est que la musique arrête de faire son sympathique bidibulubulu, et voir la fin,autre chose, la dernière image, qui fait qu’on se dit qu’on a pas lutté pour rien au fil des 530 tableaux successifs qui se ressemblent tous.

Un pogo explosif commença, et il fallu toute mon énergie de sayan défoncé pour le contenir. L’hypnose avait porté ses fruits, et l’hypnotiseur avait lâché le mot clef. Ca sautait partout et fort dans les trois premiers rangs. N’écoutant que mon courage, je vais chercher une bière au norvégien, qui tel Yggdrasil envoyait ses longues branches danser dans les gueules au hasard de ses mouvement.
J’acquittais ma mission et allait retrouver mon immortel amour, qui observait le concert de loin.
Elle n’aimait pas le show. La razzia s’était bien déroulée, elle avait bu moult hydromel,elle m’avait fait découvrir le groupe avec son enthousiasme d’érudite sexy mais les sons l’importunait sur scène. Allez savoir. Elle qui écoute les sons d’ataris st d’animal collective, n’apprécie pas le spectrum. C’est la bonne vieille guerre des consoles. Il y avait eu un truc, le mec le gonflait avec son polo de rugby.

J’allais me percher sur un banc, pour me mettre d’accord avec mon état psychique, et écoutais l’ultime morceau. Un long bug de 20 minutes. J’ai trop fumé en jouant à arkanoid, et le jeu à planté au niveau 23. Il ne reste que deux notes qui tournent en boucles et la balle casse-brique reste figée pour toujours. Je suis happé par l’écran, parceque les 4 couleurs scintillent comme des étoiles énormes, et je vois le futur dans les gros sprintes carrés qui sont si moderne que lorsque je joue, j’ai l’impression d’être dans un film. Je sais que ce n’est qu’un bug, que ce ne sont que quatres couleurs et deux notes qui tourneront en boucle jusqu’à ce que j’arrête la machine, mais je me sens si bien que je ne sens plus le temps.

C’est le norvégien qui vient me descendre de mon arbre et qui fait finalement la critique du concert.

« T’as entendu, c’est trop bon hein ? Bon ok, c’est un peu toujours pareil, mais franchement c’est trippant. C’était mieux qu’0 paris, au moins les gens se lâchent ici ! »

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