L’Homme-Fleur
Effondré, à genoux face à la fleur étrange
L’homme-viande est happé. La corolle lui mange
Le visage. Dans la bouche le pistil entre
Jusqu’au cerveau et la tige noue son ventre.
Chair végétalisée, carne et méristème,
Partout dans son corps est un nouveau système.
De ses mains, il voit, de ses pores il entends,
De ses yeux il touche, de ses poumons il sent,
De son coeur il goûte l’univers tout entier.
Maintenant son désir est de s’enraciner,
Trouver la bonne terre où il se plantera
Et de ses racines profondes, il pensera,
Un et plusieurs à la fois, en télépathie
Avec les autres fleurs, gigantesque pythie
Cosmique. Or en ce temps-là, il sera trois :
Homme, plante et monde. Son bulbe s’ouvrira,
Terrifié des herbivores et des désherbants.
L’homme-fleur au sexe de femme malgré ces tourments,
Laissera son pollen aux vents, aux mellifères,
Avant de se flétrir au chant froid de l’hiver.
(illustration : JVDEX)